l'Aveu (titre prêté)

2023-01-13

On me demande si je me sens engagé.

En fait le cliché de l'artiste engagé me fait un peu grincer. Plutôt que de considérer quels sont les sujets pour lesquels je milite en conscience, je préfère observer ceux qui m'engagent, presque malgré moi. Il y a une différence entre une idée politique avec laquelle je ne suis pas d'accord, et une injustice dont je suis témoin, qui résonne en moi et me lève le ventre, contre laquelle je ne peux pas ne pas réagir.

De ce côté, j'ai remarqué que j'ai toujours été sensible à la condition féminine dans la société. Je n'y peux rien, tout ce qui écrase les femmes me blesse plus encore que si c'était moi. Je pousse l'empathie jusqu'à me taire pour courir la chance d'entendre les intéressées se faire justice. J'ai même appris à me méfier de la satisfaction que m'apporte ma "bonne" conduite. En fait on ne peut pas dire qu'elle soit bonne, elle répond seulement à un besoin pressant et égoïste.

Peut-être que c'est parce que j'aurais tant voulu être une femme. Je veux dire vraiment être une femme, pas le devenir. A l'adolescence, quand j'ai entendu parler de ces personnes qui changaient de sexe, j'ai vite compris que ça n'était pas pour moi. Non, vraiment être ce sésame, cet aspect inexplicable, insoupçonné de la condition humaine, être l'avenir de l'humain !

Ce n'est pas ce qui m'est donné. Je suis un enfant de l'Automne, je parle du goût de l'ombre des cyprès, je parle de l'innocence du tore. Après tout je sais très bien ce que je fais, je ressasse le chant de l'oubli toujours recommencé. Que faire de toute cette identité qu'on t'accorde ? A boire

Je suis soumis au Chef du Signe de l'Automne
Partant, j'aime les fruits, je déteste les fleurs
Je regrette chacun des baisers que je donne
Tel un noyer gaulé dit au vent ses douleurs

Mon Automne éternelle, ô ma saison mentale
Les mains des amantes d'antan jonchent ton sol
Une épouse me suit, c'est mon ombre fatale
Les colombes ce soir prennent leur dernier vol

Signe (Apollinaire)